Pendant que les Haïtiens luttent pour survivre dans un pays ravagé par l’insécurité, la misère et l’effondrement des institutions, nos voisins et les puissances étrangères se partagent la gestion de notre pays, sans nous, contre nous. Le dernier épisode en date — une réunion sur Haïti tenue à Saint-Domingue sans aucun Haïtien — en dit long : Haïti est devenu un objet de négociation internationale, un territoire sous contrôle. Ce n’est plus de la coopération, c’est une servitude officielle, administrée par les États-Unis, la République Dominicaine… et désormais le Kenya.


Des décisions sur Haïti, sans Haïtiens : la réunion de la honte

Le 14 mai 2025, le président dominicain Luis Abinader a rassemblé quatre anciens présidents de son pays,  (Leonel Fernández, Hipólito Mejía, Danilo Medina et Rafael Alburquerque) ,pour discuter de la situation… en Haïti. Étrangement, ou plutôt symptomatiquement, aucun dirigeant haïtien n’était invité. À cette réunion s’est joint le ministre kényan des Affaires étrangères, venu solliciter officiellement le soutien de la République Dominicaine dans la mission de sécurité internationale censée intervenir à Port-au-Prince.

Ce fait est gravissime : un ministre étranger vient négocier une intervention militaire en Haïti… sans parler aux Haïtiens. Il consulte les Dominicains, ceux-là mêmes qui depuis des années traquent, humilient et violentent nos compatriotes.


Luis Abinader : la persécution des Haïtiens comme doctrine d’État

Car Luis Abinader n’est pas un médiateur neutre. Il mène, depuis son arrivée au pouvoir, une campagne brutale, raciste et systématique contre les migrants haïtiens. Sous son gouvernement, la République Dominicaine a expulsé des dizaines de milliers de nos compatriotes, y compris des femmes enceintes, des enfants, des étudiants, des travailleurs réguliers.

Ces rafles massives, menées par la Dirección General de Migración, s’accompagnent de violences, d’humiliations publiques, de détentions illégales, et parfois même de morts. Des Haïtiens sont arrêtés dans la rue, chez eux, dans les hôpitaux, sans aucun respect pour les droits humains fondamentaux.

Abinader va plus loin : il a ordonné la construction d’un mur de séparation entre les deux pays, un mur symbolique et politique, destiné à déchirer l’île, criminaliser la présence haïtienne, et envoyer un message clair : « Vous n’êtes pas des humains, vous êtes un problème à repousser ».

Et pourtant, c’est avec cet homme-là que le Kenya veut organiser la « sécurité » en Haïti ?


Les États-Unis, toujours en coulisses

Tandis que la République Dominicaine joue la carte du mépris frontal, les États-Unis continuent de tirer les ficelles en silence. Depuis des décennies, ils imposent des politiques destructrices, soutiennent des gouvernements illégitimes, manipulent les transitions politiques. Aujourd’hui, ils financent la mission militaire en préparation, tout en délégant l’exécution à des pays partenaires, pour éviter d’assumer directement leur ingérence.

Le résultat est le même : Haïti perd sa voix, sa capacité de décider, sa souveraineté. Nos dirigeants — eux-mêmes affaiblis, parfois complices — assistent, impuissants, à cette prise de contrôle étrangère.


Une servitude programmée

Ce n’est plus une simple crise. C’est un projet politique régional : maintenir Haïti dans un état de faiblesse permanente, sous tutelle, sans marge de manœuvre. Les États-Unis, la République Dominicaine, et maintenant le Kenya, agissent non pas pour nous sauver, mais pour nous gérer, nous surveiller, nous contenir.

Ils parlent de nous sans nous. Ils décident pour nous. Ils agissent contre nous.

Et pendant ce temps, le peuple haïtien crie famine, vit dans la peur, meurt en silence — tandis qu’à l’international, on négocie son avenir dans des salons climatisés entre bourreaux complices.

Il est temps de dire les choses clairement : Haïti est sous occupation déguisée. Une servitude internationale est en cours, et si nous ne réagissons pas collectivement, il n’y aura bientôt plus rien à sauver.

By Tanes DESULMA

Tanes DESULMA, Rédacteur en chef d’Alternance-Media, je suis diplômé en journalisme de l’ICORP et en droit public de l’École de Droit de La Sorbonne. Passionné par l’information et la justice, je m’efforce de proposer un journalisme rigoureux et engagé.