Alors que l’ancien ministre mexicain Genaro García Luna vient d’écoper de 38 ans de prison aux États-Unis pour ses liens avec le cartel de Sinaloa, en Haïti, plusieurs figures politiques et économiques accusées de trafic de drogue et de corruption continuent de jouir d’une impunité totale. Cette divergence de traitement soulève une question essentielle : à quand une vraie justice pour Haïti ?

S’interroge Tanes DESULMA, directeur de la rédaction


Le 24 mai 2024, Genaro García Luna, ex-ministre de la Sécurité publique du Mexique, a été condamné par un tribunal fédéral à New York pour avoir protégé les activités du cartel de Sinaloa. Il a été reconnu coupable de trafic de drogue, corruption et parjure. Un verdict historique. Pendant ce temps, en Haïti, les élites politiques et économiques impliquées dans des scandales similaires échappent encore à tout procès.

Le cas García Luna : un message clair contre l’impunité

Genaro García Luna, l’homme chargé de combattre les cartels, collaborait en réalité avec eux. Selon les procureurs américains, il a perçu des millions de dollars pour garantir au cartel de Sinaloa le passage sécurisé de tonnes de cocaïne vers les États-Unis.

Ce procès — et cette condamnation sévère — marque un tournant : un haut responsable d’État jugé et puni non pas dans son propre pays, mais à l’étranger, là où la justice peut agir.

Haïti : des sanctions, mais aucun procès

À l’opposé, en Haïti, une longue liste de personnalités ont été dénoncées ou sanctionnées pour des faits similaires — sans jamais passer devant un tribunal local.

Michel Martelly, ancien président, a été sanctionné par les États-Unis en 2024 pour trafic de stupéfiants et financement de gangs. 

Rony Célestin et Hervé Fourcand, deux ex-sénateurs, sont accusés d’avoir utilisé leurs fonctions pour faire transiter de la drogue. Tous ont vu leurs avoirs gelés par Washington et Ottawa, mais aucun n’a été poursuivi en Haïti.

David Acra, homme d’affaires, est sanctionné pour avoir financé des groupes armés.

Quant à Jean-Bertrand Aristide, son nom a été cité à de multiples reprises par des trafiquants internationaux comme Jacques Kétant, sans qu’aucune procédure ne soit engagée.

Le seul cas judiciaire reste celui de Guy Philippe, ancien rebelle et sénateur élu, arrêté puis extradé vers les États-Unis où il a purgé une peine pour trafic de drogue.

Et maintenant ?

La justice internationale semble parfois être le seul recours pour que des figures influentes rendent des comptes. Mais cette solution n’est pas durable. Haïti a besoin d’un système judiciaire indépendant, capable de juger ses propres élites, quel que soit leur rang.

Le cas García Luna devrait servir d’exemple. La justice n’est pas une faveur politique. Elle est le socle de tout État de droit.

By Tanes DESULMA

Tanes DESULMA, Rédacteur en chef d’Alternance-Media, je suis diplômé en journalisme de l’ICORP et en droit public de l’École de Droit de La Sorbonne. Passionné par l’information et la justice, je m’efforce de proposer un journalisme rigoureux et engagé.