DÉCRYPTAGE – Nul ne sait ce qui s’est négocié en Alaska et aucun accord n’a été détaillé. Incapable de contraindre son homologue russe, le président américain met désormais la pression sur les Ukrainiens et les Européens.
Un sommet sous haute tension
En quête de la paix (« Pursuing Peace »). Tel était le mot d’ordre de la rencontre entre Donald Trump et Vladimir Poutine, vendredi 15 août, à Anchorage, en Alaska. Objectif affiché : arracher un cessez-le-feu sur le terrain en Ukraine et préparer une réunion à trois, incluant le président ukrainien Volodymyr Zelensky. L’attente était immense, les comparaisons historiques abondantes. Beaucoup redoutaient un nouveau Munich, les États-Unis abandonnant Kiev agressée mais absente, ou un Yalta, scellant dans le secret un partage d’influence entre Washington et Moscou.
Un échec diplomatique manifeste
À l’issue de plusieurs heures d’échanges, aucun cessez-le-feu n’a été annoncé. Aucune concession n’a été arrachée. « Je veux que les massacres cessent. Je suis là pour les arrêter », avait martelé Donald Trump avant la rencontre. Le président américain, qui avait promis de « mettre fin à la guerre en vingt-quatre heures », se heurte à la fermeté de Vladimir Poutine, inébranlable sur la question territoriale. L’Ukraine n’étant pas présente à la table, la marge de manœuvre de Washington était de toute façon réduite. Anchorage apparaît ainsi moins comme une avancée diplomatique que comme un rendez-vous manqué.
L’Ukraine marginalisée, l’Europe sous pression
Volodymyr Zelensky encaisse difficilement cette exclusion. Pour Kiev, le risque est grand d’être relégué au rang de figurant dans une négociation qui se joue au-dessus de sa tête. Les Européens, eux, observent avec nervosité l’attitude de Trump. Plusieurs chancelleries redoutent que Washington, lassé d’un conflit long et coûteux, n’exige de ses alliés européens qu’ils prennent à leur charge le poids principal de l’aide militaire et financière. « Trump veut la paix, mais à nos frais », confie un diplomate européen. Berlin et Paris sont déjà pressés d’accroître leur effort.
Le calcul du Kremlin
Pour Vladimir Poutine, l’échec du sommet n’est pas une défaite. Bien au contraire. Le président russe prouve une fois encore qu’aucune solution politique n’est envisageable sans son aval. En s’affichant à égalité avec Donald Trump, il renforce sa stature internationale et légitime sa stratégie de rapport de force. Aucune concession n’ayant été consentie, Moscou sort indemne d’une rencontre qui lui offre pourtant une tribune mondiale.
Un rendez-vous manqué
À l’arrivée, l’opération tourne au désaveu pour le président américain. Celui qui espérait une victoire diplomatique éclatante revient les mains vides et fragilisé sur la scène internationale. Son ambition de forcer la paix se heurte à la réalité : la Russie n’a aucune intention de céder, l’Ukraine n’acceptera pas une paix dictée, et les Européens refusent de payer seuls le prix d’un compromis. Anchorage n’aura pas été un Munich, ni un Yalta, mais un sommet inutile, révélateur de l’impuissance américaine à imposer sa loi dans la guerre d’Ukraine.