Dans une vidéo diffusée ce lundi, l’ambassade américaine à Port-au-Prince déroule la liste des « efforts » de Washington pour stabiliser Haïti. Soutien à une nouvelle force internationale de 5 000 hommes, sanctions contre les gangs et leurs bailleurs, révocation de visas pour les acteurs politiques complices : à première vue, le discours est séduisant. Mais derrière ce langage policé se cache une vérité brutale : les États-Unis préparent une mise sous tutelle d’Haïti, sous couvert du Chapitre VII des Nations unies, relève dans sa chronique Ralph Siméon, éditorialiste politique « ALTERNANCE MÉDIA « .

L’histoire récente nous avertit. La MINUSTAH, déployée en 2004 avec l’appui américain, a laissé derrière elle des scandales d’abus, des viols impunis et l’épidémie de choléra qui a tué plus de 10 000 Haïtiens. L’aide massive après le séisme de 2010, largement contrôlée par Washington, s’est transformée en fiasco : milliards engloutis, dépendance renforcée, institutions fragilisées. Chaque fois qu’Haïti a cédé ses leviers de décision, cela s’est soldé par plus de misère et moins de souveraineté.

Depuis Jovenel Moïse, les États-Unis portent une responsabilité directe dans la crise actuelle. Ils ont bloqué discrètement la livraison d’armes et de véhicules blindés dont la police et l’armée avaient besoin pour contenir les gangs. Après l’assassinat du président Jouvenel Moïse, Washington a imposé par un X(twitter) Ariel Henry comme Premier ministre, sans mandat populaire, aggravant la fracture entre l’État et la population. Puis, ils ont forcé Haïti à demander une mission internationale dirigée par le Kenya, sachant que cette solution était vouée à l’échec faute de moyens et de vision. Pendant ce temps, le trafic d’armes en provenance de Floride alimente nos bourreaux dans une indifférence complice.

Non, les États-Unis ne sont pas des spectateurs passifs de notre descente aux enfers. Ils en sont les architectes. Leur stratégie est claire : laisser pourrir la situation afin de justifier, à terme, une reprise en main totale de notre souveraineté.

Haïti n’a pas besoin d’un tuteur. Haïti a besoin de partenaires respectueux. Ce dont nous avons urgemment besoin, c’est de soutien logistique pour nos forces de sécurité, de coopération pour fermer le robinet des armes qui inondent nos quartiers, et d’investissements dans nos propres forces vives. L’avenir d’Haïti doit être pensé par et pour les Haïtiens.

Dire non à la tutelle américaine, ce n’est pas refuser l’aide. C’est refuser de revivre les mêmes erreurs, les mêmes humiliations, les mêmes dépendances. L’heure est venue pour Haïti d’affirmer haut et fort : notre sécurité, notre démocratie et notre dignité ne sont pas négociables.

By Ralph Siméon

Ralph SIMÉON- journaliste engagé, animateur et entrepreneur. J'ai fait mes premiers pas à Radio Haïti Inter, média emblématique et référence nationale. En France, j'ai cofondé Haïti Tribune avant de rejoindre le service créole de Radio France Internationale ( RFI). Mon parcours incarne un engament constant en faveur de l'information , du lien social et de la valorisation d' Haïti sur la scène internationale.

2 thoughts on “Haïti face au piège américain : dire non à la tutelle déguisée”

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