Un drame insoutenable a une nouvelle fois secoué Haïti. À Port-au-Prince, des gangs armés ont commis un acte d’une barbarie indescriptible en ordonnant à une mère de jeter son propre enfant dans un pneu enflammé. Face à cette demande inhumaine, elle a catégoriquement refusé, mais les criminels ont eux-mêmes exécuté l’horreur sous ses yeux. Impuissante et brisée par cette atrocité, la mère a succombé à son chagrin et à la douleur avant de rendre son dernier souffle hier dans un commissariat de Pétion-Ville. Là, sous les yeux de policiers censés protéger la population, elle a rejoint son enfant dans un sommeil éternel, victime d’un État absent et d’une insécurité grandissante. Cet acte ignoble, qui s’ajoute à une série d’exactions, illustre la terreur qui règne dans le pays. Les gangs, désormais assimilables à des groupes terroristes, étendent leur contrôle sur des territoires de plus en plus vastes, allant de Kenscoff à l’est de la capitale, jusqu’à L’Arcahaie au nord, en passant par Mirbalais au nord-ouest et Léogâne au sud. À seulement un kilomètre de Mirbalais, les bandits avancent, ayant quitté Morne Derrière Cabrit. La population de Carrefour-Feuilles, déjà frappée par la violence, doit de nouveau fuir, tandis que les quartiers de Pacot, Debussy, Turgeau et Croix-des-Prés vivent sous la menace constante d’attaques meurtrières.

Ici, Mme Eliane Thélemarque, mère du bébé, décédée au commissariat de Petion- Ville.

L’insécurité ne cesse d’empirer, et malgré l’installation du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) depuis plus de dix mois, aucune amélioration n’est en vue. Les gangs contrôlent les trois principales routes nationales du pays, paralysant l’économie et isolant plusieurs villes. Pire encore, alors que chaque membre du CPT perçoit un revenu cumulé dépassant 50 000 dollars par mois, ils demeurent incapables de rétablir l’ordre ou de garantir la sécurité. Récemment, des criminels ont attaqué la population de Kenscoff, s’approchant dangereusement du centre-ville. L’ancien député Alfredo Antoine a confirmé l’absence de l’armée haïtienne dans la commune après que deux militaires ont été blessés. Pendant que l’exécutif tente de célébrer le carnaval, les bandits, eux, poursuivent leur mission de terreur, détruisant hôpitaux et incendiant des infrastructures essentielles.

Face à cette situation catastrophique, la question demeure : où est l’État ? Les autorités en place vont-elles enfin prendre des mesures concrètes pour éradiquer cette menace, ou continueront-elles à observer, impuissantes, la descente aux enfers du pays ?
La situation actuelle ne dépasse-t-elle pas les capacités du CPT et du gouvernement en place ? Face à l’effondrement sécuritaire et institutionnel du pays, ne devraient-ils pas tirer les conséquences de leur échec et se retirer ? Comme le disait Aristote, « L’homme est un animal politique », ce qui implique que la gestion de la cité exige des compétences, une vision et un sens aigu des responsabilités. Or, en politique, l’incapacité à gouverner ne devrait-elle pas conduire au départ, conformément à la pensée de Max Weber qui affirmait que « la politique est une vocation », sous-entendant qu’elle doit être exercée par ceux qui en ont la capacité et la légitimité ?

Hôpital HUEH, brûlé le 13 février 2025

L’incendie de hôpital de l’Université d’Etat d’Haïti (HUEH) communément appelé l’Hopital général, l’exode forcé des habitants et l’absence totale de forces de l’ordre démontrent un effondrement total de l’État. La population, abandonnée à son sort, craint que le pays ne soit en train de vivre ses derniers jours sous sa forme actuelle. Haïti est aujourd’hui en péril, et si rien n’est fait, il sera bientôt trop tard.

By Willy DESULMA

Willy DÉSULMA, Normalien diplômé de l’École Normale Supérieure et économiste formé à la Faculté de Droit et des Sciences Économiques de l’Université d’État d’Haïti, est journaliste et responsable de l’information à Alternance Média TV. Passionné par la diffusion d’une information claire et fiable, il s’engage à informer avec rigueur et professionnalisme. Expert en analyse économique et éducation, il combine savoir et expertise pour éclairer l’actualité et contribuer au débat public.