La violence des gangs continue de ravager Haïti. Selon un rapport publié mardi par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), au moins 5601 personnes ont été tuées en 2024, soit 1000 de plus qu’en 2023. Ces chiffres, vérifiés par l’ONU, reflètent l’intensité croissante de la crise sécuritaire.
« Ces chiffres ne peuvent à eux seuls rendre compte des horreurs absolues qui sont perpétrées en Haïti, mais ils montrent la violence incessante à laquelle les gens sont soumis », a déclaré Volker Türk, le chef du HCDH, dans un communiqué. Outre les homicides, 2212 personnes ont été blessées et 1494 enlevées au cours de la même période.
Une capitale sous contrôle des gangs
Haïti, pays le plus pauvre des Caraïbes, est submergé par une violence endémique exercée par des gangs armés qui contrôlent, selon l’ONU, 85 % de Port-au-Prince, la capitale. Cette situation a persisté malgré l’arrivée, en juin dernier, de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), une opération dépendante de l’ONU.
Dirigée par le Kenya, la mission compte environ 400 policiers, mais son impact reste limité en raison d’un manque criant de ressources. Les exactions des gangs, incluant des meurtres, des viols, des pillages et des enlèvements contre rançon, se poursuivent. Début janvier, des soldats du Guatemala et du Salvador ont été déployés pour renforcer la MMAS, mais les résultats se font toujours attendre.
Un massacre orchestré par le gang Wharf Jérémie
Parmi les violences les plus marquantes de 2024, le massacre de décembre dans un quartier de Port-au-Prince a particulièrement choqué. Le chef du gang Wharf Jérémie a ordonné l’exécution de 207 personnes, principalement des personnes âgées accusées de pratiques vaudoues ayant causé la mort de son fils.

Photo: Clarens Siffroy Archives Agence France-Presse Une femme pleure devant sa maison après que des gangs armés l’aient incendiée dans le quartier de Post Marchand à Port-au-Prince, le 17 décembre 2024.
Les membres du gang ont mutilé, brûlé les corps et en ont jeté d’autres à la mer pour effacer les preuves. Cet événement illustre l’extrême brutalité des gangs qui opèrent dans l’impunité.
Impunité et corruption : des moteurs de la crise
Selon le HCDH, 315 lynchages de membres présumés de gangs et 281 exécutions sommaires impliquant des unités de police spécialisées ont été recensés en 2024. Certains de ces actes auraient été facilités par des officiers de police eux-mêmes.
Volker Türk dénonce un système gangréné par l’impunité et la corruption, qu’il considère comme des causes profondes de la crise multidimensionnelle d’Haïti. « Les inégalités économiques et sociales profondément enracinées alimentent également cette situation », a-t-il ajouté.
Appels à l’action internationale
Le Haut-Commissaire demande des efforts accrus de la part des autorités haïtiennes, avec le soutien de la communauté internationale, pour rétablir l’état de droit. Il appelle également à un soutien logistique et financier renforcé pour la MMAS, tout en exigeant que les policiers impliqués dans des violations des droits humains soient tenus responsables.
M. Türk a également réclamé une application stricte des sanctions imposées par le Conseil de sécurité de l’ONU et de l’embargo sur les armes. Enfin, il exhorte les pays étrangers à ne pas renvoyer les migrants haïtiens dans un pays en pleine crise humanitaire et sécuritaire.
Une situation alarmante
Alors que la violence en Haïti atteint des niveaux sans précédent, l’inaction risque de prolonger et d’aggraver cette tragédie humaine. Le rétablissement de la sécurité et de l’état de droit demeure une priorité, mais les efforts internationaux doivent être à la hauteur de l’urgence.