Il n’a jamais vraiment disparu. Mais depuis la réélection de Donald Trump à la Maison Blanche en novembre 2024, Erik Prince, l’ancien patron de la sulfureuse société militaire privée Blackwater, revient au premier plan. À travers sa nouvelle entreprise, Vectus Global, il entend se réinstaller comme acteur incontournable de la guerre, de la sécurité et des affaires stratégiques dans les pays fragiles.
De Blackwater à Vectus Global
Ex-membre des Navy SEAL et héritier d’une riche famille américaine, Erik Prince s’était déjà illustré dans les années 2000 avec Blackwater, une société militaire privée qui comptait plus de 20 000 employés au plus fort des guerres en Irak et en Afghanistan. Véritable bras armé de la privatisation de la défense américaine, Blackwater s’était taillée une réputation redoutée, parfois entachée de scandales liés aux bavures commises sur le terrain.
Aujourd’hui, Prince s’appuie sur Vectus Global pour renouer avec son passé. Sa société se positionne sur plusieurs terrains sensibles :
sécurisation de mines stratégiques en Afrique (notamment en République démocratique du Congo) ; lutte contre les groupes armés non étatiques ; expulsion de migrants « illégaux » en Amérique centrale ; coopération sécuritaire dans des pays rongés par la corruption comme Haïti, le Salvador, le Pérou ou l’Équateur.
Le bras sécuritaire du trumpisme
Si ce retour est possible, c’est d’abord parce que Donald Trump, son allié de longue date, est de retour à la présidence. Prince se présente désormais comme un relais direct de la vision trumpiste de l’ordre mondial : moins de diplomatie, plus de force, et une externalisation accrue de la guerre au profit d’acteurs privés.
Pour ses partisans, il offre des solutions rapides dans des États incapables d’assurer eux-mêmes leur sécurité. Pour ses détracteurs, il incarne une nouvelle forme de colonialisme sécuritaire, où les ressources naturelles et les enjeux géopolitiques passent avant la souveraineté des peuples.
Haïti et l’Amérique latine dans le viseur
Haïti, plongé dans une crise sécuritaire sans fin, fait partie des terrains d’intérêt de Vectus Global. Erik Prince a déjà proposé par le passé des « solutions privées » pour pacifier l’île, notamment via des forces de mercenaires. Le Salvador et le Pérou, confrontés au narcotrafic et à l’instabilité politique, pourraient aussi devenir des laboratoires de cette nouvelle sécurité sous-traitée.
Le spectre d’un retour en arrière
Vingt ans après les excès de Blackwater, l’histoire semble se répéter. Dans un monde multipolaire où les guerres hybrides, les trafics et les rivalités économiques s’entrecroisent, Erik Prince tente de reprendre sa place. Mais cette résurgence pose une question centrale : la sécurité des peuples peut-elle être confiée à des entrepreneurs privés, motivés avant tout par le profit ?