La justice haïtienne relance l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moïse. Dans une décision rendue publique le lundi 13 octobre, la cour d’appel de Port-au-Prince a annulé l’ordonnance du juge Walter Wesser Voltaire, qui avait inculpé 51 personnes, dont l’ex-première dame Martine Moïse. Cette décision, qualifiée de tournant majeur dans l’affaire, marque la volonté des juges d’approfondir un dossier longtemps miné par des soupçons de manipulation politique et d’ingérence.

La cour d’appel, réunie en audience publique sous la présidence du magistrat Emmanuel Lacroix, assisté de Frémond Damici et Denis Cyprien, a ordonné la réouverture complète de l’instruction. Elle a désigné le magistrat Denis Cyprien pour poursuivre l’enquête « sur la forme et sur le fond », tout en maintenant en détention les personnes déjà incarcérées, notamment les 17 anciens militaires colombiens accusés d’avoir participé au complot meurtrier du 7 juillet 2021.

Mais la décision va plus loin : les magistrats haïtiens ont sollicité l’entraide judiciaire des États-Unis et du Canada afin de permettre l’audition de plusieurs personnalités clés, parmi lesquelles l’ex-Premier ministre Ariel Henry, l’ancien directeur général de la Police nationale d’Haïti Léon Charles, l’ancien ministre Roger Noël Cius, ainsi que l’ex-première dame Martine Moïse et le fils du président défunt, Joverlein Moïse.

Cette demande d’assistance internationale intervient dans un contexte où plusieurs des protagonistes cités résident désormais à l’étranger, tandis que d’autres ont bénéficié jusqu’ici d’une protection politique ou diplomatique. La démarche de la cour d’appel vise donc à garantir que toutes les personnes citées dans le dossier puissent être entendues, quelles que soient leurs fonctions ou leurs alliances passées.

Il convient de rappeler que l’ordonnance du juge Voltaire avait été dénoncée par de nombreuses parties civiles comme une « décision de la honte », accusée d’écarter certaines pistes sensibles et de protéger des acteurs influents. Les avocats de plusieurs inculpés avaient interjeté appel, arguant d’irrégularités graves et d’une instruction « bâclée ».

Avec la réouverture de l’enquête et la désignation du juge Denis Cyprien, la justice haïtienne semble vouloir redonner un souffle à un dossier qui, plus de quatre ans après les faits, continue d’empoisonner la vie politique nationale. Reste à savoir si Washington et Ottawa répondront favorablement à cette sollicitation, et si Haïti trouvera enfin la vérité sur l’un des assassinats politiques les plus retentissants de son histoire contemporaine.

By Ralph Siméon

Ralph SIMÉON- journaliste engagé, animateur et entrepreneur. J'ai fait mes premiers pas à Radio Haïti Inter, média emblématique et référence nationale. En France, j'ai cofondé Haïti Tribune avant de rejoindre le service créole de Radio France Internationale ( RFI). Mon parcours incarne un engament constant en faveur de l'information , du lien social et de la valorisation d' Haïti sur la scène internationale.

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