Depuis la fin du mois de mars 2025, la ville de Mirbalais est plongée dans une crise sécuritaire sans précédent. Des groupes armés ont pris le contrôle de la commune, semant la terreur et provoquant l’exode de milliers d’habitants. Cette situation paralyse la vie locale et compromet la reprise des infrastructures essentielles. L’hôpital universitaire de Mirebalais, jadis symbole d’espoir et de modernité, est aujourd’hui en grande difficulté, contribuant à aggraver la crise humanitaire.

Mais les répercussions de cette insécurité dépassent les frontières de la commune. Elles touchent directement Port-au-Prince, la capitale, où l’approvisionnement en électricité est désormais suspendu à un double verrou : la colère populaire à Péligre et le contrôle territorial des gangs à Carrefour.

Le barrage hydroélectrique de Péligre, principal fournisseur de courant pour Port-au-Prince, est à l’arrêt. Ce ne sont pas les gangs qui l’occupent, mais des habitants en colère qui en bloquent l’accès, exigeant des garanties de sécurité avant toute reprise des activités. En parallèle, la centrale électrique de Carrefour, déjà fortement dysfonctionnelle, ne peut être relancée sans un accord explicite avec les gangs qui y font la loi.

Face à cette impasse, le gouvernement, incapable de rétablir l’ordre à Mirbalais – condition sine qua non d’un retour à la normale –, envisagerait une négociation directe avec le chef de gang Chrisla. Objectif : sécuriser un compromis pour réactiver la centrale de Carrefour et restaurer partiellement l’alimentation électrique de la capitale.

Mais ce scénario, s’il se concrétise, ne serait qu’un compromis fragile, laissant entre les mains des groupes armés un levier de pression immense sur les autorités. Car en l’absence de contrôle effectif de l’État, ces groupes peuvent à tout moment perturber, monnayer ou détourner l’usage d’infrastructures vitales.

Ce double verrou – pression populaire à Péligre, influence des gangs à Carrefour – illustre la profonde désarticulation de l’État haïtien. Pris en étau entre une population excédée par l’insécurité et des acteurs armés qui imposent leurs règles, l’État voit sa légitimité, déjà fragile, s’effriter davantage.

Le retour de l’électricité à Port-au-Prince dépend désormais d’un équilibre incertain entre négociations politiques, revendications populaires et réalités de terrain. Ce compromis précaire ne saurait masquer l’échec structurel de l’Étatà assurer sécurité, gouvernance et continuité des services essentiels. Sans une restauration durable de l’ordre à Mirbalais et ailleurs, la lumière restera un luxe inaccessible pour la majorité des Haïtiens.