Publié le 14 octobre 2025

La sécurité, pourtant principale mission de la transition, semble être devenue pour le Conseil présidentiel de transition (CPT) un simple prétexte diplomatique.
Pendant que les gangs consolident leur emprise sur la capitale et que la population vit dans la peur, le nouveau coordinateur du CPT, Laurent Saint-Cyr, multiplie les déplacements à l’étranger pour « plaider la cause d’Haïti ». Son dernier voyage au Japon illustre, une fois de plus, le fossé entre le discours officiel et la réalité du terrain.

Dans une interview accordée au Nouvelliste à Osaka, Laurent Saint-Cyr a défendu les retombées de sa mission. Reçu par l’empereur Naruhito et le premier ministre Shigeru Ishiba, il affirme avoir sollicité le soutien du Japon pour la force de suppression des gangs et pour la relance des activités de la JICA (Agence japonaise de coopération internationale) en Haïti.
Mais pendant qu’il vante à Tokyo la solidarité des pays amis, Port-au-Prince reste sous la coupe des groupes armés. La Police nationale d’Haïti, sous-équipée et démoralisée, peine à reprendre le contrôle du territoire. Le quotidien des Haïtiens demeure marqué par la peur, les enlèvements, les routes bloquées et les marchés abandonnés.

De retour au pays, Laurent Saint-Cyr s’est plaint du manque d’assistance de la communauté internationale, estimant que les promesses faites à la transition n’ont pas été tenues. Pourtant, cette même communauté rappelle que le CPT n’a toujours pas rempli sa part de l’accord : restaurer un climat de sécurité et préparer les élections.
Sur ces deux points, la transition s’enlise dans la confusion et l’attentisme.

Interrogé sur le calendrier électoral, le président du CPT a reconnu qu’aucune date n’était encore fixée. Il évoque de vagues discussions avec les secteurs politiques afin d’éviter le « chaos » au 7 février prochain. Ces déclarations traduisent une réalité inquiétante : le CPT semble désormais plus préoccupé par la prolongation de son mandat que par la sortie de crise.

Laurent Saint-Cyr annonce déjà d’autres voyages, notamment au Qatar, pour parler « sécurité et investissement ». Mais à quoi servent ces tournées diplomatiques si la première mission du Conseil — rétablir la sécurité nationale — reste inachevée ?
Haïti ne manque pas de plaidoyers, elle manque d’actions.
Le peuple n’attend plus de promesses, il attend la fin de la peur.

En s’abritant derrière le manque de soutien international, le CPT tente de justifier son incapacité à agir et prépare déjà les arguments d’une prolongation politique.
La vérité, elle, demeure inchangée : sans sécurité, il n’y aura pas d’élections. Et sans volonté politique, il n’y aura ni sécurité, ni avenir.

🟦 Le Point Alternance

La transition devait servir à rétablir l’ordre, pas voyager pour le justifier.
D’un Japon à un Qatar, le CPT multiplie les rencontres pendant que le pays s’enfonce dans le désordre. L’État ne se délègue pas, il s’exerce.* Tant que la sécurité restera une excuse et non une action, Haïti restera prisonnière d’une transition sans fin.

By Ralph Siméon

Ralph SIMÉON- journaliste engagé, animateur et entrepreneur. J'ai fait mes premiers pas à Radio Haïti Inter, média emblématique et référence nationale. En France, j'ai cofondé Haïti Tribune avant de rejoindre le service créole de Radio France Internationale ( RFI). Mon parcours incarne un engament constant en faveur de l'information , du lien social et de la valorisation d' Haïti sur la scène internationale.

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