Officiellement annoncée comme annulée par la mairie de Paris après un courrier d’un collectif citoyen, la rencontre du parti Les Engagés pour le Développement (EDE) s’est tout de même tenue, le jeudi 23 octobre 2025, à la mairie du 17ᵉ arrondissement de Paris, dans un climat mêlant prudence et défiance.
L’ancien Premier ministre haïtien Claude Joseph, aujourd’hui président du parti EDE, était accompagné de trois proches collaborateurs : Marc Antoine Berthier, ancien ministre de la Défense, Géraldine Lucéa Laurent, responsable du mouvement Fanm EDE, et le coordonnateur de la Jeunesse EDE.
Revenu d’Espagne, où il intervenait au Global Youth Leadership Forum de Santander, Claude Joseph a profité de son passage à Paris pour échanger avec les membres d’EDE France et quelques sympathisants.
Un rendez-vous discret sous tension
Si le discours officiel met en avant un moment d’« échanges constructifs autour d’une vision d’Haïti durable », la tenue de cette rencontre n’a pas fait l’unanimité.
Plusieurs membres de la diaspora avaient exprimé, sur les réseaux sociaux et dans certaines associations, leur refus catégorique de voir revenir sur le devant de la scène des acteurs politiques considérés comme coresponsables de l’effondrement de l’État haïtien.
Pour ces citoyens, Claude Joseph incarne cette génération de dirigeants qui, de gouvernement en gouvernement, ont promis la rupture sans jamais la concrétiser.
« Ils se présentent comme porteurs de changement, mais ils sont issus du même système qui a plongé le pays dans le chaos », dénonce un membre d’un collectif haïtien basé en région parisienne.
Une défiance persistante envers la classe politique
Malgré cette contestation, la rencontre s’est déroulée dans le calme, sans heurts, dans la salle prêtée par la mairie du 17ᵉ arrondissement.
Claude Joseph a profité de l’occasion pour remercier ses partisans :
« Je tiens à adresser mes plus sincères remerciements aux membres et sympathisants du Parti EDE en France pour l’accueil chaleureux qui m’a été réservé. Les échanges fructueux […] ont mis en lumière l’engagement profond de nos compatriotes de la diaspora », a-t-il écrit sur X (ex-Twitter).
Mais derrière ces mots policés, la fracture entre la classe politique traditionnelle et une population épuisée par des décennies d’échecs reste béante.
Nombreux sont ceux, dans la diaspora comme en Haïti, qui ne croient plus aux discours des anciens dirigeants, qu’ils soient de passage à Paris, à Montréal ou à New York.
Une image à reconstruire
Cette rencontre, tenue sous le sceau de la discrétion, montre que Claude Joseph tente de maintenir son réseau international et de préparer une éventuelle présence lors des prochaines élections.
Mais la tâche s’annonce ardue : dans une Haïti en crise profonde, la parole politique a perdu toute crédibilité.
Et, comme le rappellent de plus en plus de voix dans la diaspora, le renouveau ne pourra venir que de visages neufs, portés par une autre éthique et une autre vision du pouvoir.