Reportage :avec notre équipe en RD
Une phrase choc résume l’état d’esprit d’une partie de l’opinion publique dominicaine face aux Haïtiens : « Ils ne comprennent que les coups de bâton ». Ce mépris assumé, relayé jusque dans certains cercles politiques, illustre la brutalité croissante de la politique migratoire de la République dominicaine, alors qu’Haïti s’enfonce dans le chaos.
Walantana : arrêtée à l’hôpital après une césarienne
Walantana, jeune mère haïtienne, n’oubliera jamais ces trois jours. À peine sortie d’une césarienne, elle a été interpellée dans une chambre d’hôpital à Saint-Domingue par des agents de l’immigration dominicaine.
Son « crime » : ne pas pouvoir présenter trois documents administratifs prouvant sa régularisation. Pourtant, elle est mariée à un Dominicain et « en cours de régularisation ». Transférée au centre de détention de Haina, elle raconte avoir passé une journée sans lit et sans nourriture.
Un mur, des expulsions massives et un rejet assumé
Sous la présidence de Luis Abinader, la République dominicaine assume une politique de fermeté maximale :
- Un mur frontalier en construction pour « protéger » le pays de l’instabilité haïtienne ;
- Des expulsions massives, parfois violentes, visant principalement des migrants pauvres ;
- Un discours de rejet, ancré dans une vieille fracture raciale et culturelle entre les deux nations.
Depuis son indépendance, la République dominicaine revendique une identité « métissée et hispanophone », en opposition à un Haïti majoritairement noir et créolophone. Cette distinction historique, héritée de la colonisation, nourrit aujourd’hui des pratiques discriminatoires dénoncées par les ONG internationales.
Un peuple abandonné des deux côtés
Certes, Haïti traverse une crise sans précédent : effondrement de l’État, violence des gangs, pauvreté endémique. Mais ceux qui fuient cette tragédie ne devraient pas être traités comme des criminels.
Pendant que la communauté internationale reste silencieuse, les Haïtiens subissent une double injustice : abandonnés par leurs élites corrompues et rejetés par des voisins qui ferment leurs portes avec des barbelés.
En somme
La République dominicaine a le droit de protéger ses frontières. Mais ce droit ne peut justifier l’humiliation d’un peuple frère. Les coups de bâton ne construiront jamais la paix.